Un vaccin pour lever la résistance aux immunothérapies

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L’immunothérapie est une véritable révolution thérapeutique pour les patients atteints de cancers métastatiques comme le mélanome, le poumon ou la vessie. Malheureusement, elle ne fonctionne que chez 10 à 25 % des patients pouvant en bénéficier.

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Des chercheurs du Centre de Recherche de Cancérologie de Lyon (CRCL - Inserm / CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1 / Centre Léon Bérard), du Centre Léon Bérard, et de Gustave Roussy ont montré qu’un vaccin de source commerciale permet de lever la résistance aux immunothérapies. Leur étude publiée dans Science Translational Medicine souligne que non seulement les vaccins de la gastroentérite peuvent provoquer la mort immunogénique des cellules cancéreuses in vitro mais aussi que l’association de ces vaccins et d’une immunothérapie provoque une puissante réponse immunitaire anti-tumorale in vivo là où l’immunothérapie seule n’était pas efficace.

ZOOM SUR L'IMMUNOTHÉRAPIE

L’immunothérapie diffère des autres traitements du cancer par le fait qu’elle ne cible pas directement la tumeur mais le système immunitaire du patient lui-même. En stimulant les défenses immunitaires de l’organisme contre les cellules cancéreuses, ces traitements cherchent à inhiber le contrôle qu’exercent ces dernières sur le système immunitaire. L’objectif est de libérer ou rétablir l’action développée par le système immunitaire du patient contre sa propre tumeur, afin de la réduire, voire de l’éliminer.

Actuellement, l’immunothérapie est utilisée en pratique courante dans le traitement des stades avancés des mélanomes et des cancers du poumon. Elle est développée dans de nombreuses autres tumeurs telles que les cancers du rein, les cancers de la vessie, les cancers ORL, la maladie de Hodgkin, les cancers du sein. Elle devrait à terme jouer un rôle majeur dans la prise en charge de la majorité des tumeurs, y compris dans les stades plus précoces.

Comment lever la résistance aux immunothérapies et permettre à un maximum de patients de bénéficier de ces traitements innovants ?

Une équipe de chercheurs menée par Aurélien Marabelle (Gustave Roussy et Centre Léon Bérard), Christophe Caux (Inserm U1052) et Sandrine Valsesia-Wittmann (Centre Léon Bérard - Inserm UA8) s’est penchée sur la question. Le groupe a eu l’idée d’utiliser des vaccins pour rendre l’immunothérapie efficace dans des cancers où elle ne l’est pas encore. Ce faisant, l’objectif était aussi d’augmenter le nombre de patients qui pourraient en bénéficier dans les cancers où elle a démontré son efficacité.

« Dans cette étude, notre équipe de recherche s’est intéressée à des tumeurs pédiatriques tels que les neuroblastomes, cancers agressifs qui ne répondent pas aux immunothérapies existantes comme les anti-PD(L)1 et anti-CTLA4. Dans l’objectif de transformer la réponse de ces tumeurs à l’immunothérapie, nous avons utilisé différents vaccins comme sources d’éléments pro-inflammatoires car les agents pathogènes tels que les virus ont la capacité de stimuler directement des récepteurs de l’immunité innée » explique Aurélien Marabelle. 

Vaccins de la gastroentérite

Dans un premier temps, les chercheurs ont testé in vitro 14 vaccins différents disponibles commercialement (ex. BCG, Cervarix, TicoVac,…) pour leur capacité à stimuler ces récepteurs de l’immunité innée.

Parmi ces 14 vaccins, ils ont identifié ceux contre le Rotavirus (Rotarix, Rotateq), virus responsable des gastroentérites, comme ayant de fortes propriétés pro-inflammatoires. De façon inattendue, ils ont observé que ces derniers possédaient une fonction oncolytique, c’est-à-dire une capacité à préférentiellement infecter et tuer les cellules cancéreuses par rapport aux cellules normales et à induire ce que l’on appelle une mort immunogénique. 

La puissance de la combinaison vaccin-immunothérapie

Les chercheurs ont aussi testé in vivo les vaccins les plus pro-inflammatoires dans des modèles de neuroblastomes pour lesquels les immunothérapies anti-PD(L)1 et anti-CTLA4 sont inefficaces chez l’homme. Pour cela, ils les ont injectés soit par voie systémique, soit directement dans les tumeurs (voie intra-tumorale).

Ils ont constaté que lorsque les vaccins contre le Rotavirus étaient injectés directement dans les tumeurs, certaines régressaient jusqu’à disparaitre. Lorsqu’ils ont ensuite combiné l’injection vaccinale avec des immunothérapies anti-PD(L)1 ou CTLA4, toutes les tumeurs disparaissaient.

Alors qu’habituellement, les tumeurs ne répondent pas bien à l’un ou l’autre de ces traitements, la combinaison des deux génère une forte réponse immunitaire anti-tumorale systémique capable d’éradiquer les tumeurs injectées et les non-injectées. « Nos résultats démontrent que les Rotavirus contenus dans les vaccins contre la gastroentérite peuvent rendre sensibles à l’immunothérapie des tumeurs qui seraient naturellement résistantes », souligne Christophe Caux, directeur de recherche INSERM basé sur le site du Centre Léon Bérard. 

De façon intéressante, cette combinaison de traitements permet non seulement la régression de la tumeur dans laquelle le vaccin a été injecté mais également celle de tumeurs à distance identifiant donc un rôle majeur du système immunitaire dans le traitement des cancers. 
 

  • La recherche fondamentale au Centre Léon Bérard

    La recherche fondamentale s’intéresse à comprendre les mécanismes biologiques fondamentaux qui conduisent à la formation des cancers. Au Centre Léon Bérard, elle se déroule dans les laboratoires du Centre de recherche en cancérologie de Lyon (CRCL).

    En savoir plus sur la recherche au CLB