Cancers et vaccin contre le papillomavirus pour les garçons : le Dr Rousset Jablonski répond aux questions

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La vaccination contre le papillomavirus humain (ou HPV) a récemment été élargie aux jeunes garçons, l'occasion de demander au Dr Rousset-Jablonski, gynécologue au Centre Léon Bérard, de répondre à quelques-unes de nos questions sur le vaccin contre le HPV, les cancers ayant pour cause le papillomavirus humain et l'intérêt de la vaccination des filles et des garçons, sans distinction.

Cancers et vaccin contre le papillomavirus pour les garçons : le Dr Rousset Jablonski répond aux questions Cancers et vaccin contre le papillomavirus pour les garçons : le Dr Rousset Jablonski répond aux questions 2021-01-06T13:52:56+01:00 2021-01-07T17:00:45+01:00 /sites/default/files/2021-01/rousset-jablonski.jpg

La vaccination contre le papillomavirus vient d’être élargie aux jeunes garçons de 11 à 14 ans tandis que le vaccin Gardasil 9 était recommandé depuis 2013 chez les jeunes filles de 11 à 14 ans. Dr Rousset Jablonski, pouvez vous nous expliquer l'intérêt de la vaccination des jeunes garçons ?

 

Dr Rousset Jablonski : 

Les vaccins s’inscrivent dans une démarche de prévention primaire (ils visent à éviter l’infection et donc l’apparition de lésions précancéreuses et cancéreuses). La vaccination contre l’HPV était déjà recommandée aux jeunes filles dans le cadre du calendrier vaccinal, ainsi que chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Malheureusement, la couverture vaccinale reste encore très insuffisante en France.

La vaccination des jeunes garçons a alors plusieurs intérêts : un intérêt direct qui est de mieux protéger les garçons et les hommes quelle que soit leur orientation sexuelle, et des intérêts indirects qui sont de freiner la transmission des papillomavirus au sein de la population générale et mieux protéger les filles et les femmes non vaccinées.

De quelles maladies protège ce vaccin ?

 

Dr Rousset Jablonski : 

Ce vaccin protège de l’ensemble des maladies liées aux papillomavirus ou HPV (Human Papillomavirus). Les HPV sont une famille de virus qui peuvent infecter la peau et/ou les muqueuses.

Ce virus est sexuellement transmissible puisque transmis par les contacts des muqueuses. Parmi eux, certains sont dits à « bas risque », et sont responsables du développement de verrues génitales (condylomes). Les HPV dits à « haut risque » (ou HPV oncogènes) cancérogènes peuvent provoquer à terme le développement de différents types de cancers, le plus fréquent d’entre eux étant le cancer du col de l’utérus, chez la femme.

Plusieurs étapes sont nécessaires au développement d’une lésion à risque ou d’un cancer et toutes les femmes présentant une infection à HPV ne développeront pas nécessairement de lésion.

Les autres cancers liés à l’HPV sont par ordre de fréquence après le cancer du col de l'utérus, les cancers des voies aéro-digestives supérieures (oropharynx, cavité buccale, larynx), le cancer du canal anal, le cancer du vagin, de la vulve, ou encore le cancer du pénis.

 

La vaccination contre le HPV est désormais possible pour les jeunes garçons et permettra de freiner la transmission des papillomavirus au sein de la population générale tout en évitant la stigmatisation des jeunes homosexuels

Comment fonctionne cette vaccination, y a-t-il un rappel, un rattrapage est-il possible ?

 

Dr Rousset Jablonski : 

Ce vaccin est réalisé par injection intramusculaire. Il est recommandé pour tous les garçons de 11 à 14 ans révolus, et dans ce cas le schéma de vaccination prévoit 2 injections (injection initiale, puis à 6 mois).

Un rattrapage est possible pour tous les adolescents et jeunes adultes de 15 à 19 ans révolus non encore vaccinés. Dans ce cas, 3 doses seront nécessaires (injection initiale, puis à 2 et 6 mois).

Enfin, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes peuvent être vaccinés jusqu’à 26 ans révolus selon un schéma à 3 doses.

 

Eviter des cancers grâce à une meilleure couverture vaccinale

Des simulations montrent que l’augmentation de la couverture vaccinale à 70 % (contre 24% actuellement) permettrait d’éviter chaque année en France plus de 1000 cancers du col de l’utérus, 15 cancers du vagin, 20 cancers de la vulve, 415 cancers de l’anus et 660 décès.

Quels sont les risques de ce vaccin ?

 

Dr Rousset Jablonski : 

Le profil de sécurité de ce vaccin chez l’homme est similaire à celui observé chez la femme.

Les évènements indésirables les plus fréquemment rapportés sont une douleur au site d’injection (de 70 à 90%), une rougeur ou un gonflement, et plus rarement des maux de tête, de la fièvre, des nausées.

Les vaccins contre les HPV ont fait l’objet d’une évaluation rigoureuse avant leur mise sur le marché. Comme tous les vaccins, les autorités de santé françaises, européennes et internationales réalisent un suivi régulier de ces vaccins.

De nombreuses études étayent désormais l’absence de lien entre la vaccination et la survenue de maladies auto-immunes. L’analyse de la littérature scientifique montre que les effets indésirables graves allégués des vaccins contre les HPV ne sont pas validés scientifiquement.

 

Comment est-on sûr de l’intérêt de ce vaccin chez les garçons ?

 

Dr Rousset Jablonski : 

L’intérêt de la vaccination chez les jeunes filles a d’ores et déjà été démontré dans de larges études épidémiologiques, notamment dans les pays où la couverture vaccinale est supérieure. Ces études ont retrouvé une réduction significative des condylomes génitaux, des lésions de dysplasie (lésions à risque du col), et de cancer du col de l’utérus.

Trois vaccins (bivalent, quadrivalent et nonavalent) existent actuellement.

Les vaccins anti-HPV de première génération (bivalent et quadrivalent) assurent une protection contre les types 16 et 18, responsables d’environ 70 % des cancers cervicaux et d’une large proportion des autres cancers associés au HPV. Le vaccin quadrivalent confèrent également une protection contre les types 6 et 11, responsables d’environ 90 % des verrues génitales. Le vaccin de deuxième génération (nonavalent) devrait permettre une protection supplémentaire aux risques de cancer et des lésions condylomateuses.

La vaccination des garçons, en plus de freiner la transmission des papillomavirus au sein de la population générale, permettra également d’atteindre plus facilement les futurs hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes en évitant toute stigmatisation, à un âge où leur préférence sexuelle est soit non connue (par l’individu et son entourage), soit non affirmée.