Bioinformatique : la recherche sur le cancer à l'heure du Big Data

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Big data et haut débit : deux notions qui ont largement contribué à repenser nos habitudes et manières de travailler. La recherche sur le cancer a ainsi vu naître de nouveaux métiers à l’image d’Anne-Sophie Sertier et Anthony Ferrari, Ingénieurs en bio-informatique également appelés « bio-informaticiens ». Ils nous expliquent leurs missions.

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Nouveaux métiers

Rencontre avec Anne-Sophie Sertier et Anthony Ferrari, ingénieurs en bio-informatique également appelés « bio-informaticiens »

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Quel est votre parcours et votre rôle au Centre Léon Bérard ?

Anne-Sophie : Nous avons une formation en bio-informatique, avec un apprentissage pluridisciplinaire axé sur les mathématiques, les statistiques et l’informatique en lien avec la biologie. En tant que bio-informaticiens, nous collaborons auprès des équipes de recherche fondamentale, translationnelle et clinique.  

En quoi consiste votre métier ?

Anthony : Le séquençage haut débit a révolutionné la recherche. Il y a encore quelques années, nous ne pouvions analyser que quelques gènes d’une même tumeur alors qu’aujourd’hui nous pouvons caractériser la tumeur dans sa globalité. Pour le dire autrement, nous travaillons avec une résolution d’image et un niveau de détails que nous n’avons jamais eus auparavant. Ces nouvelles données nécessitent des outils spécifiques pour être analysées et c’est notre rôle de les développer.

D’où proviennent ces données ?

Anthony : Elles sont produites par les séquenceurs ADN du CLB et de centres de séquençages espagnols, allemands et britanniques avec lesquels nous collaborons. Les séquenceurs lisent l’ADN de la tumeur d’un patient et en génèrent des milliards de données qui nous arrivent directement ici au CLB. 

Êtes-vous en lien direct avec les chercheurs travaillant en laboratoire ?

Anne-Sophie : Bien sûr ! Nous fonctionnons en « aller-retour » : les données brutes produites par le séquenceur ADN nous parviennent, nous les analysons, puis nous présentons les résultats au chercheur. Grâce à son expertise biologique, il affinera les résultats et orientera le patient vers la thérapie la plus adaptée à son cancer.

En quoi la bio-informatique a révolutionné la recherche en cancérologie ?

Anthony : La bio-informatique est devenue un pilier indispensable de la recherche. Aujourd’hui, nous générons plus de données que nous sommes capables d’en traiter manuellement. Il a fallu 30 ans d’efforts internationaux pour séquencer le premier génome humain contre quelques heures seulement aujourd’hui. C’est ce que l’on appelle le Big Data en cancérologie. Une des tâches essentielles de notre métier est de maîtriser ce flux de données colossal, le stocker et l’analyser.

Quelle découverte récente avez-vous faite ?

Anne-Sophie : L’étude intitulée Programme ICGC et publiée dans la revue Nature Communications, avait pour but de caractériser l’ensemble des mutations présentes dans certains cancers dont le cancer du sein. L’une des conclusions portait sur un sous type de cette famille de cancer dont la tumeur est amplifiée sur le gène HER2. Ce cancer représente 15 % des cancers du sein et est l’un des rares à disposer d’une thérapie ciblée. Pourtant, 25 % des patientes rechutent. Nous avons donc cherché à en comprendre les raisons. Nous avons démontré que même si cette tumeur formait un groupe homogène d’un point de vue clinique, il existait au niveau génomique une forte hétérogénéité, autrement dit des sous-groupes distincts dans ce type de cancer du sein. Cette hétérogénéité pourrait expliquer la différence de sensibilité aux thérapies.

Bio-informaticien : un métier nouveau devenu incontournable

La révolution numérique et les nouvelles technologies nous permettent aujourd’hui de produire des données très facilement et en peu de temps. Les besoins s’inversent puisque la production des données via le séquenceur ADN prend désormais moins de temps que son analyse. Cette nouvelle réalité a fait naître de nouveaux métiers pour analyser, conceptualiser mais aussi stocker ces milliards d’informations. En 2017, dix bio-informaticiens sont présents sur le site du CLB. Ils travaillent exclusivement sur ordinateur mais tout comme le chercheur en blouse blanche, leurs travaux ont une visée thérapeutique.